Il était de ces géants discrets, ceux qui ont participé, parfois dans l’ombre, à la construction du Québec moderne. Sherpa dévoué de la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ), Michel Nadeau, qui a joué un rôle vital pour le Québec inc., est décédé aujourd’hui à l’âge de 75 ans après un combat contre le cancer.
• À lire aussi: Le fleurdelysé tatoué sur le cœur: trois grands bâtisseurs de la Caisse racontent
Pourtant, rien ne le destinait à mener une carrière dans le monde de la finance. Détenteur d’un baccalauréat en sciences politiques de l’Université Laval, Michel Nadeau se dirigeait davantage vers un métier plus libéral.
Mais après une discussion avec un professeur de McGill qui lui fait comprendre l’importance pour les Québécois de prendre leur place dans l’économie, il bifurque et obtient un MBA, comme il l’a raconté récemment au Devoir.
C’est justement dans ce quotidien qu’il commence sa carrière en 1973. Journaliste économique, puis éditorialiste financier, il met en lumière les succès des entreprises d’ici, un pied de nez aux bonzes de Bay Street qui regardent le Québec avec dédain.
Son arrivée à la Caisse
Et c’est cet amour du Québec et cette compréhension des enjeux économiques qui l’amènent à la Caisse de dépôt et placement du Québec.
« Nous n’avions pas de culture entrepreneuriale forte. On l’a développée et on a donné des outils aux entrepreneurs québécois pour grandir, on a créé les leaders de demain », avait récemment confié Michel Nadeau au Journal.
Il restera 18 ans à la CDPQ et imprimera sa vision, en assurant la double mission de l’organisme : obtenir du rendement, mais aussi travailler à faire grandir l’économie québécoise.
« Au nom de tous les employés de la CDPQ, je tiens à souligner la grande contribution de Michel Nadeau dans l’histoire de cette organisation importante que nous avons le privilège de servir, au bénéfice des Québécois, a déclaré Charles Emond, président et chef de la direction de la CDPQ. Aujourd’hui, c’est la voix d’un expert apprécié et pertinent qui vient de s’éteindre au Québec. »
« Il était toujours calme. Il savait qu’il allait réussir. C’était enrichissant de travailler avec lui », a souligné dernièrement son ancien patron, Jean Campeau, qui l’avait embauché dans les années 1980 à la Caisse de dépôt.
Un journaliste dans l’âme
Pour Jean-Claude Scraire qui a mené la destinée de la CDPQ entre 1996 et 2002, Michel Nadeau avait conservé son regard de journaliste.
« Michel est demeuré un journaliste du quotidien, il voyait toujours ce qui se passait et se demandait chaque jour : quelle peut être ma contribution ? Il faisait de multiples actions pour avoir un impact au quotidien. Et même lorsqu’il a été à l’Institut de la gouvernance (IGOPP), il aidait les entreprises, il développait notre économie », a-t-il souligné.
Pendant cette période, Michel Nadeau met en place un programme de stagiaires dans les firmes de courtage qui va permettre à plusieurs finissants de bien comprendre l’économie et la finance.
Il va aussi jouer un rôle primordial dans la vente de Vidéotron à Québecor après avoir bloqué la transaction à la torontoise Rogers.
« À l’interne, on voulait encourager Québecor. On savait qu’il était important de supporter l’entreprise et on devait tout faire pour garder une technologie émergente au Québec », a-t-il révélé récemment.
Vulgariser les enjeux économiques
Pour les journalistes, il était un vulgarisateur hors pair, un expert de la gouvernance qui connaissait tous les racoins des entreprises d’ici.
« Michel Nadeau était très généreux de son temps et de son expertise, toujours disponible pour expliquer, contextualiser et nous donner un éclairage de ce qui se jouait vraiment derrière les portes closes. Il était une ressource assez unique pour les journalistes en économie », a souligné le journaliste économique Gérald Fillion.
Pour l’animateur Georges Pothier qui l’a côtoyé pendant plusieurs années, Michel Nadeau avait conservé une humilité malgré son parcours impressionnant.
« Pour moi, il était le gentleman du Québec Inc. Il savait tout ce qui se passait, connaissait tout le monde et était respecté par tous et toutes dans le monde des affaires, mais ne s'en vantait jamais. Je garderai le souvenir d'un homme bon, généreux et passionné », nous a-t-il confié.
Pierre Karl Péladeau a tenu à saluer la philosophie qui animait Michel Nadeau.
« Si Vidéotron a été acquise par une entreprise québécoise, c’est grâce à lui. Il a su convaincre les autorités politiques des bienfaits de promouvoir les intérêts des entreprises québécoises », a souligné le président et chef de la direction de Québecor.
« D’une certaine façon, il était partisan de la même philosophie que celle de mon père. La meilleure façon de devenir politiquement indépendant, c’est de le devenir économiquement ».
– Avec la collaboration avec Pierre-Olivier Zappa, TVA Nouvelles
Michel Nadeau, l'homme qui aimait le Québec inc., est décédé - Le Journal de Montréal
Read More
No comments:
Post a Comment