(Ottawa) La pandémie de COVID-19 est peut-être arrivée sans crier gare, mais l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC) savait depuis plus de 10 ans que la gestion de la réserve nationale stratégique d’urgence était « déficiente », et elle n’a pas agi — ce qui est symptomatique d’une « gouvernance et [d’] une surveillance inadéquates ».
Les problèmes liés à de gestion des stocks — équipement de protection individuelle (EPI) et équipements médicaux — de la réserve ont fait en sorte que l’ASPC n’était pas « pas aussi bien préparée qu’elle aurait pu l’être » pour répondre aux besoins des provinces et des territoires », conclut la vérificatrice générale du Canada, Karen Hogan, dans un rapport déposé mercredi.
En dépit des lacunes identifiées dans des audits internes menés par l’Agence en 2010, puis en 2013, on n’a pas su corriger le tir, s’étonne l’agente indépendante du Parlement dans son audit. « À notre avis, cela remet en question l’efficacité de la gouvernance et de la surveillance exercées par l’Agence », est-il écrit dans le document.
« Les problèmes liés aux stocks périmés et à l’aliénation de ces stocks, soulevés dans le rapport d’audit interne de 2010, n’avaient pas été réglés. Certains des stocks de la réserve fédérale étaient périmés ou désuets, et l’ASPC ne faisait pas le suivi de l’âge ou de la date de péremption de certains articles », poursuit la vérificatrice générale.
L’achat d’équipement de protection individuelle et d’instruments médicaux semblait se faire à l’aveuglette depuis plusieurs années. Il n’y avait « aucun processus » fondé « sur les besoins », et par conséquent, « les achats ont été effectués en fonction du budget disponible », alors que l’on composait avec des « contraintes budgétaires », selon des documents internes cités dans le rapport de Karen Hogan.
Bref, les défaillances non corrigées à l’ASPC ont fini par ressurgir, et ce, « au pire moment », a-t-elle résumé en conférence de presse à Ottawa.
Le gouvernement fédéral a constitué la réserve nationale stratégique d’urgence dans les années 1950, afin de protéger la population canadienne contre les menaces liées à la Guerre froide. Depuis, son rôle a évolué : il consiste à stocker les fournitures nécessaires pour aider les provinces et les territoires en situation d’urgence sanitaire.
La stratégie d’approvisionnement saluée
En revanche, l’ASPC a su s’ajuster en fonction de l’urgence et de la gravité de la crise. Et avec la complicité de Santé Canada et de Services publics et Approvisionnement Canada, on est parvenu à répondre aux besoins criants des provinces et des territoires en ce qui a trait à l’achat et la distribution d’équipement que s’arrachaient tous les pays à travers le monde.
La vérificatrice générale a cependant de bons mots Services publics et Approvisionnement Canada, qui « a mobilisé des ressources et a modifié ses activités d’approvisionnement afin de procéder rapidement […] à l’acquisition de l’équipement requis pour répondre à la pandémie », écrit-elle dans son audit qui tient sur une quarantaine de pages.
« Le ministère a accepté certains risques afin de pouvoir se procurer de grandes quantités d’équipement dans un marché où l’offre n’était pas toujours à la hauteur de la demande. Sans cela, il y aurait eu moins d’équipement à la disposition des provinces et des territoires », relève Mme Hogan.
Pour en arriver à ces constats, elle a passé au peigne fin 39 contrats, de l’achat de masques N95 aux blouses médicales en passant par les écouvillons de dépistage ou encore les ventilateurs. Pour 14 de ces contrats, le gouvernement a versé des paiements anticipés. Et dans la moitié de ces cas, le ministère n’a pas su démontrer qu’il s’était assuré que les fournisseurs étaient, par exemple, viables financièrement.
Mais dans les circonstances, les risques étaient « raisonnables », estime la vérificatrice générale du Canada, qui a également produit un rapport sur la façon dont Services aux Autochtones Canada s’était adapté pour répondre aux besoins accrus des collectivités autochtones pendant la pandémie.
Les titulaires des ministères ayant fait l’objet de ces enquêtes réagiront mercredi après-midi aux conclusions les touchant.
Rapport de la vérificatrice générale | Une « gouvernance inadéquate » à l'Agence de la santé publique du Canada - La Presse
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