Comment être plus efficaces dans notre consommation d'énergie? Faut-il aller jusqu'à construire de nouveaux barrages hydroélectriques? Plus de 80 experts et chercheurs se sont réunis lundi à l'invitation du ministre de l'Économie, de l'Innovation et de l'Énergie du Québec, Pierre Fitzgibbon, dans le cadre d'une consultation en vue du dépôt d’un projet de loi sur l'encadrement et le développement des énergies propres prévu à l'automne prochain.
Hydro-Québec a récemment confirmé à Radio-Canada qu'il reste environ 1000 mégawatts (MW) dans le réseau pour le développement de nouveaux projets. Sur les 21 000 mégawatts de projets évoqués, autour de 10 000 MW sont des propositions sérieusement étudiées.
La demande augmente aussi du côté des ménages. Lors de la tempête de verglas du 3 février dernier, un document d'Hydro-Québec révèle qu'à 18 h, les Québécois ont poussé la demande de puissance jusqu'à 43 124 MW, malgré les efforts de réduction momentanée de certaines industries, du jamais-vu. Le précédent record était de 40 380 MW, soit une différence de presque 3000 MW. Hydro-Québec avait dû importer 2000 MW de l'Ontario et de l'État de New York.
Au Québec, c’est récent de parler d’un bilan énergétique serré. Il y a un an, on avait des surplus électriques
, a dit le ministre Fitzgibbon en entrevue à l’émission Zone économie.
« Je pense qu’il faut mieux communiquer comme gouvernement pour expliquer à la population qu’on ne manquera pas d’électricité pour chauffer les ménages. L’enjeu n’est pas là. On manque d’électricité pour les projets structurels. »
Pas de hausse des tarifs
Selon lui, il est toutefois essentiel de réduire la demande énergétique au Québec, mais il affirme qu’une hausse des tarifs d’électricité n’est pas envisagée pour le moment.
Je pense que les Québécois ne sont pas prêts pour ça
, a dit M. Fitzgibbon, indiquant que le gouvernement pourrait envisager des incitatifs financiers pour une consommation différente [...] lors des heures de pointe
.
On peut même envisager de réduire les factures d’électricité parce que l’enjeu n’est pas de faire plus de revenus, mais c’est de réduire la demande même en dehors des pointes
, a-t-il ajouté.
Le premier ministre François Legault a par ailleurs déjà défendu l'idée de fournir de l'électricité à bas prix aux industries qui contribuent à la décarbonation de l'économie. Il a cité la filière batterie, l'hydrogène vert, l'aluminium vert et l'acier vert, entre autres.
Qu’en est-il des barrages hydroélectriques? Faut-il en construire plus pour assurer la demande énergétique à venir de la province?
M. Fitzgibbon n’écarte pas cette idée, mais il dit préférer regarder toutes les offres disponibles
− éoliennes, turbines et biomasse − avant d’aller de l’avant avec la construction d’un nouveau barrage. À la fin, est-ce qu’il va manquer d'électricité? Peut-être. À ce moment-là, il va falloir des barrages
, a-t-il affirmé.
« Il faut planifier les ressources sur une base de 10 ans. Qu’est-ce qu’on fait du gaz naturel? On consomme au Québec l’équivalent de 17 000 MW en gaz naturel, c’est 17 barrages. Si demain on dit qu’on ne veut plus de gaz naturel, il y aura 17 barrages. Ça n’arrivera pas de toute évidence. »
Une utilisation intelligente de l'énergie
Selon Pierre-Olivier Pineau, titulaire de la Chaire de gestion du secteur de l'énergie à HEC Montréal, qui a participé à la journée de consultation lundi, la question des barrages n’a pas été beaucoup abordée.
L’ensemble des intervenants ne pensent pas que les barrages soient vraiment une option viable à court terme étant donné leurs coûts et le manque d’acceptabilité sociale
, a dit M. Pineau à l’émission 24.60. Mais c’est évident que des projets éoliens, solaires ou des projets décentralisés comme la géothermie ont fait partie des discussions.
Il affirme lui aussi que les tarifs d’électricité sont appelés à évoluer
. Ça ne veut pas dire qu’on va payer plus cher, mais on va peut-être payer un peu différemment dans les années à venir
, a-t-il ajouté.
« On l’a vu avec le verglas, [...] le réseau de distribution doit être plus résistant. Ça va coûter de l’argent, donc c’est à peu près certain qu’on devra payer plus cher pour l’électricité, mais c’est dans l’optique de sortir du pétrole et donc on dépensera beaucoup moins d’argent pour l’essence et le diesel. La facture d’énergie des Québécois [...] pourrait même diminuer. »
Normand Mousseau, professeur de physique et directeur scientifique de l'Institut de l'énergie Trottier à Polytechnique Montréal, était lui aussi présent à la journée de consultation. Au lieu de parler de sobriété
énergétique, un terme qui dénote une certaine privation, selon lui, il préfère adopter l’expression utilisation intelligente de l’énergie
.
Il soulève notamment le besoin de réformer les normes de construction au Québec, qui sont démodées
à ses yeux.
Les gouvernements tardent à mettre en place des réglementations sur l’efficacité énergétique pour s’assurer que les bâtiments vont consommer moins d’énergie
, a-t-il dit au micro de l’émission Le 15-18. Et le chauffage, on le sait, est un aspect très important dans la demande énergétique, surtout en hiver.
Selon lui, les intentions du gouvernement par rapport aux consultations sont encore un peu opaques
, mais on sent qu’il y a beaucoup de projets qui atterrissent sur la table de M. Fitzgibbon
.
D’ici là, avant de déposer son projet de loi qui vise à moderniser la Loi sur Hydro-Québec et la Loi sur la Régie de l’énergie cet automne, le ministre de l'Énergie compte encore rencontrer des représentants autochtones et ouvrir la consultation au public, en ligne, dès le 1er juin.
Énergies renouvelables : Québec tente d'établir ses priorités pour répondre à la demande - Radio-Canada.ca
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