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Saturday, February 25, 2023

Plaidoyer d'une jeune fortunée pour une plus grande justice fiscale - La Presse

Claire Trottier est née dans une famille fortunée qui disposait de moyens financiers démesurés par rapport à ceux de la population en général, et elle en a rapidement pris conscience. Tout comme elle a été très vite sensibilisée aux inégalités qui existent à l’échelle mondiale et qui règnent tout autant au Québec. Il faut, selon elle, que les riches et ultrariches apportent leur juste contribution et participent pleinement à tous les défis de société en étant imposés correctement.

En cette période de préparation des déclarations de revenus, on entend la plupart du temps les gens se plaindre du trop lourd fardeau fiscal qu’ils ont à soutenir.

On souligne que les membres de la classe moyenne et supérieure sont injustement imposés par rapport aux gens fortunés qui disposent de toutes sortes de moyens pour éluder l’impôt qu’ils ont à payer ou réduire à son minimum les contributions qu’ils doivent faire.

Claire Trottier, fille de Lorne Trottier, cofondateur de la société technologique Matrox, qui a connu un grand succès depuis sa fondation en 1976, est aussi d’avis que les riches ne paient pas leur juste part d’impôt et qu’il est grand temps que les choses changent.

Depuis quatre ans, en marge du Forum économique mondial de Davos, Claire Trottier cosigne avec 200 millionnaires et milliardaires de partout dans le monde un manifeste qui réclame l’imposition d’une taxe sur la richesse et sur les successions des grandes fortunes.

« J’ai beaucoup lu sur la question et je ne suis pas la seule fortunée qui veut s’engager pour une meilleure justice fiscale. Aux États-Unis, il y a des groupes comme Patriotic Millionaires qui militent depuis des années pour une restructuration du système fiscal américain.

« Au Canada, je me suis jointe au groupe Ressources en mouvement qui regroupe des jeunes de 20-30 ans, issus de familles riches qui veulent aussi payer leur juste part d’impôt », expose la philanthrope et militante.

Le modèle fiscal que souhaitent implanter ces mouvements est simple : il s’agit d’instaurer une taxe sur la richesse de 2 % sur les fortunes de plus de 5 millions, de 3 % sur les 50 millions et plus et enfin de 5 % sur les fortunes familiales de plus de 1 milliard. Une taxe qui pourrait rapporter jusqu’à près de 50 milliards au Canada, selon Claire Trottier.

PHOTO CHARLES WILLIAM PELLETIER, COLLABORATION SPÉCIALE

Claire Trottier

Mme Trottier ne veut pas se prononcer sur les façons dont seraient déterminés les niveaux de richesse de ces nouveaux cotisants, elle n’est pas fiscaliste et ce n’est pas à elle à décider, mais au gouvernement.

De telles mesures n’encourageraient-elles pas le recours accru aux paradis fiscaux qui sont déjà très utilisés par les grandes fortunes ?

« Les paradis fiscaux existent déjà et c’est un autre problème auquel il faut s’attaquer de toute façon. Le statu quo est inacceptable. Une telle taxe ne changerait absolument rien à mon train de vie et ça permettrait aux gouvernements d’avoir des moyens additionnels pour s’attaquer aux grands problèmes de l’heure », souligne Claire Trottier.

Répondre aux crises

Titulaire d’un doctorat en immunologie et virologie de l’Université McGill, Claire Trottier a quitté son poste de professeure à McGill il y a deux ans pour se consacrer à ses activités de philanthropie au sein de la Fondation familiale Trottier et à ses fonctions de présidente du conseil d’administration de l’OBNL Collectif Bienvenue.

« On a mis sur pied cet OBNL en 2017 pour soutenir les immigrants demandeurs d’asile. On mise sur l’économie circulaire pour venir en aide aux réfugiés, leur trouver des meubles, des vêtements qu’on va chercher directement chez les donateurs. On leur offre aussi un soutien psychosocial », explique Claire Trottier.

L’explosion du nombre de demandeurs d’asile qui transitent par le chemin Roxham a créé une immense pression auprès de l’organisme Collectif Bienvenue, qui est littéralement submergé de demandes de toutes parts.

PHOTO CHARLES WILLIAM PELLETIER, COLLABORATION SPÉCIALE

Claire Trottier

On est confronté aux changements climatiques, à la crise du logement, à l’inflation qui frappe les plus démunis, la crise migratoire… Il faut que les plus riches fassent leur part. J’étais plus imposée quand j’étais professeure que je ne le suis aujourd’hui parce que je reçois des dividendes.

Claire Trottier, philanthrope et militante

La Fondation familiale Trottier, qui était dotée de plus de 230 millions avant la vente d’une partie des activités de Matrox à l’américaine Zebra Technologies pour 1,1 milliard l’an dernier, intervient pourtant activement dans les domaines des changements climatiques, de la santé, de l’éducation et des sciences.

« Oui, mais la philanthropie ne réglera pas tout. On ne peut pas compter sur la seule générosité de quelques-uns, il faut que les riches contribuent. La générosité ne peut se substituer à la justice. Aux États-Unis, même [Joe] Biden l’a évoqué dans son discours sur l’état de l’Union en suggérant une taxe pour les milliardaires, l’idée fait son chemin et avance », se réjouit Claire Trottier.

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